La dame qui est venue au collège pour traumatiser les petits 5èmes à force d'images chocs de cadavres désarticulés et de voitures déchiquetées ne croyait pas si bien dire : si on ne parle pas de sécurité routière en famille, c'est par superstition. Elle a parlé, et les grosses frayeurs se sont succédé sur l'asphalte.
Pour mémoire, je rappelle que la route de Patelinvillers est sujette à la malédiction du mardi. Déjà deux voitures de flinguées cette année; ajoutez-en une troisième! Mes collègues ne sont pourtant pas des folles de la route! ça va sentir le neuf sur le parking du collège! Enfin, si je reste vivant suffisamment longtemps pour faire frétiller mes narines, parce que deux camions ont voulu ma peau le même jour. J'ai longtemps pensé qu'on ne donnait le permis poids lourds qu'à des gens vigilants, doués d'un minimum de conscience et de respect pour la vie d'autrui. Même lorsque des deux tonnes déboulaient en trombe derrière moi dans des villages tout en courbes en m'étourdissant d'appels de phares pour m'exhorter à me défier des limites de vitesse ou à rouler sur les trottoirs pour les laisser passer, je continuais de le penser.
Mais qu'un camion se rabatte, en pleine ville, sur la voie de droite sans contrôler si une voiture y roulait alors que, oui, il y avait la mienne, m'obligeant à déborder sur la piste cyclable et m'y arrêter (pour le coup, pas eu le temps de vérifier si un vélo arrivait!) sous peine de mort immédiate, ça fait douter de l'homo automobiliensis. Le pire, c'est qu'il ne s'est aperçu de rien - tout préoccupé de ma survie, je n'ai même pas songé à klaxonner... Plus tard, c'est un autre camion qui a décidé de dépasser une voiture aux feux de détresse allumés, tout en haut d'une côte... sauf que cette côte, moi je la montais, avec deux suivants suceurs de roues (forcément, à la vue de la-dite voiture, je ne roulais pas vite, puisque je m'attendais à une tuile pareille après l'expérience du matin). Le plus beau, c'est que sans renoncer à son dépassement qu'il commençait à peine au moment où il a dû nous voir apparaître, il a multiplié les appels de phares... CONNARD! (pardon).
Je suppose que c'était la Sainte-Imprudence, parce que tout le monde s'y est mis, ce jour-là. J'ai même cru un moment que j'avais réussi à devenir invisible (fermez vos salles de bain à clé!). La question qui m'agite est : la promotion des langues anciennes vaut-elle la peine que je devienne moi-même lettre morte?
Pour en revenir à l'intervention de la dame de la sécurité routière, plus que les images de carnage - si crues qu'elles ont suscité chez moi un paradoxal détachement -, plus que son pessimisme, plus encore que le récit minuté de la perte de son fils qui aurait mon âge, ce sont les larmes des gosses qui m'ont retourné. La sensibilité et l'empathie de certains amènent aussi à se remettre en question.
G.
Pour mémoire, je rappelle que la route de Patelinvillers est sujette à la malédiction du mardi. Déjà deux voitures de flinguées cette année; ajoutez-en une troisième! Mes collègues ne sont pourtant pas des folles de la route! ça va sentir le neuf sur le parking du collège! Enfin, si je reste vivant suffisamment longtemps pour faire frétiller mes narines, parce que deux camions ont voulu ma peau le même jour. J'ai longtemps pensé qu'on ne donnait le permis poids lourds qu'à des gens vigilants, doués d'un minimum de conscience et de respect pour la vie d'autrui. Même lorsque des deux tonnes déboulaient en trombe derrière moi dans des villages tout en courbes en m'étourdissant d'appels de phares pour m'exhorter à me défier des limites de vitesse ou à rouler sur les trottoirs pour les laisser passer, je continuais de le penser.
Mais qu'un camion se rabatte, en pleine ville, sur la voie de droite sans contrôler si une voiture y roulait alors que, oui, il y avait la mienne, m'obligeant à déborder sur la piste cyclable et m'y arrêter (pour le coup, pas eu le temps de vérifier si un vélo arrivait!) sous peine de mort immédiate, ça fait douter de l'homo automobiliensis. Le pire, c'est qu'il ne s'est aperçu de rien - tout préoccupé de ma survie, je n'ai même pas songé à klaxonner... Plus tard, c'est un autre camion qui a décidé de dépasser une voiture aux feux de détresse allumés, tout en haut d'une côte... sauf que cette côte, moi je la montais, avec deux suivants suceurs de roues (forcément, à la vue de la-dite voiture, je ne roulais pas vite, puisque je m'attendais à une tuile pareille après l'expérience du matin). Le plus beau, c'est que sans renoncer à son dépassement qu'il commençait à peine au moment où il a dû nous voir apparaître, il a multiplié les appels de phares... CONNARD! (pardon).
Je suppose que c'était la Sainte-Imprudence, parce que tout le monde s'y est mis, ce jour-là. J'ai même cru un moment que j'avais réussi à devenir invisible (fermez vos salles de bain à clé!). La question qui m'agite est : la promotion des langues anciennes vaut-elle la peine que je devienne moi-même lettre morte?
Pour en revenir à l'intervention de la dame de la sécurité routière, plus que les images de carnage - si crues qu'elles ont suscité chez moi un paradoxal détachement -, plus que son pessimisme, plus encore que le récit minuté de la perte de son fils qui aurait mon âge, ce sont les larmes des gosses qui m'ont retourné. La sensibilité et l'empathie de certains amènent aussi à se remettre en question.
G.
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