Réderie. Comprendre « vide-grenier ». Si vous ne savez pas ça, n’espérez pas survivre en Picardie. On vous regarderait avec des yeux ronds : « tu sais pas ce que c’est, une réderie ? » (ça sent le vécu, hein ? et oui…). Les gens d’ici croient que la France entière connaît ce nom. De toute façon, les gens d’ici ne vous comprennent pas lorsque vous prononcez le pourtant très académique « crayon à papier ». La première fois que c’est l’expression « crayon de bois » qui m’est venue spontanément à l’esprit, j’ai cru que j’avais renié une partie de moi (la partie top classe), et compris qu’il fallait que je quitte l’Amiénie au plus vite…
J’ai largement dévié – comme quoi tout me ramène à mon désir de partir ! Réderie, disais-je, territoire idéal de l’amateur de kitschouilleries. Je me souviendrai longtemps de l’air enthousiaste de cette bonne dame picarde rougeaude, bien du cru, et de la vague de honte qui a dû empourprer mon visage lorsqu’elle s’est exclamée, bien fort sur ce petit bout de trottoir : « Ils aiment Ringo, ces jeunes !!! »
Il faut dire que ça faisait bien dix minutes que mon homme, Schtouf, Poussinou et moi, examinions tous ses vinyles à la recherche de tubes planétaires tels que : « allô à l’OVNI », « Ma jalousie » ou « Le grand corbeau noir ». Il n’empêche, je me suis senti tout penaud.
Ce jour-là, on n’a guère trouvé que la « Cétacé danse » (je hais mon scanner et sa panne), un peu de folklore auvergnat, les hits de l’eurovision 1960 version musette et ça ====>
Mais la persévérance paie, et il est plus que temps d’étudier de plus près la virtuosité langagière de cet artiste, connu aussi sous le nom complet de Ringo Willy-Cat (groârr):
J’ai largement dévié – comme quoi tout me ramène à mon désir de partir ! Réderie, disais-je, territoire idéal de l’amateur de kitschouilleries. Je me souviendrai longtemps de l’air enthousiaste de cette bonne dame picarde rougeaude, bien du cru, et de la vague de honte qui a dû empourprer mon visage lorsqu’elle s’est exclamée, bien fort sur ce petit bout de trottoir : « Ils aiment Ringo, ces jeunes !!! »
Il faut dire que ça faisait bien dix minutes que mon homme, Schtouf, Poussinou et moi, examinions tous ses vinyles à la recherche de tubes planétaires tels que : « allô à l’OVNI », « Ma jalousie » ou « Le grand corbeau noir ». Il n’empêche, je me suis senti tout penaud.
Ce jour-là, on n’a guère trouvé que la « Cétacé danse » (je hais mon scanner et sa panne), un peu de folklore auvergnat, les hits de l’eurovision 1960 version musette et ça ====>
Mais la persévérance paie, et il est plus que temps d’étudier de plus près la virtuosité langagière de cet artiste, connu aussi sous le nom complet de Ringo Willy-Cat (groârr):
1) Ma jalousie, 1972
Nous passerons vite sur cet opus qui ne vaut que par son inégalable refrain :
Ma jalousie a brisé notre amour
Na na na na na na na na na na na na na na na
N.B. : j’ai supprimé quelques nanana pour plus de lisibilité, mais le cœur y est.
2) Qui est ce grand Corbeau Noir, 1979 (sevenetinaïne pôwâ !)
Comme tout vénérable artiste de l’époque (voir Karen, quelque part par là), Ringo brille surtout par la qualité de ses adaptations. D’un fade « Video kills the radio stars », texte bêtement figuratif qu’il transfigure, Ringo fait un monument de non sens. Avec humilité, il reconnaît lui-même son incapacité à comprendre parfaitement le message crypté que les Muses lui envoient : « Changez de chaîneu/ Que je commprenneu ».
Conformément à « l’enthousiasme », conception antique de l’art inspiré, Ringo est le simple réceptacle de forces qui le dépassent, le haut parleur « branché sur un réseau de symphonies ». Pour apprécier pleinement cette chanson, je pense d’ailleurs qu’on ne peut pas faire l’économie d’une relecture du Ion de Platon. Les voix sensuelles des sirènes (« ohwhoho ! », « nouâhâhâr »), symbole bien connu d’une connaissance absolue, tentante mais dangereuse pour l’homme, accompagnent d’ailleurs l’artiste dans ses interrogations métaphysiques. C’est vrai quoi, c’est qui ce corbeau noir, à la fin ? N’ayez crainte, tout s’explique…
Ce grand corbeau noir est donc une métaphore de l’art inspiré. Je ne vous ferai pas l’affront de vous rappeler que le corbeau est l’un des oiseaux d’Apollon, dieu de l’art et de la vérité. Pour l’occasion, notre Ringo se fait la réincarnation de la Pythie que le dieu manipulait afin d’éclairer (ou pas) les mortels sur leur avenir. Je ne vois pas d’autre explication possible à la présence du volatile éponyme dans cette chanson pleine de « fusée », de « stéréo », de « radar » et autres finasseries technologiques…
Il apporte aussi sa pierre à la défense des Droits de l’Homme, d’une touche discrète. La chanson n’est-elle pas un plaidoyer pour les mariages mixtes ?
Conformément à « l’enthousiasme », conception antique de l’art inspiré, Ringo est le simple réceptacle de forces qui le dépassent, le haut parleur « branché sur un réseau de symphonies ». Pour apprécier pleinement cette chanson, je pense d’ailleurs qu’on ne peut pas faire l’économie d’une relecture du Ion de Platon. Les voix sensuelles des sirènes (« ohwhoho ! », « nouâhâhâr »), symbole bien connu d’une connaissance absolue, tentante mais dangereuse pour l’homme, accompagnent d’ailleurs l’artiste dans ses interrogations métaphysiques. C’est vrai quoi, c’est qui ce corbeau noir, à la fin ? N’ayez crainte, tout s’explique…
Ce grand corbeau noir est donc une métaphore de l’art inspiré. Je ne vous ferai pas l’affront de vous rappeler que le corbeau est l’un des oiseaux d’Apollon, dieu de l’art et de la vérité. Pour l’occasion, notre Ringo se fait la réincarnation de la Pythie que le dieu manipulait afin d’éclairer (ou pas) les mortels sur leur avenir. Je ne vois pas d’autre explication possible à la présence du volatile éponyme dans cette chanson pleine de « fusée », de « stéréo », de « radar » et autres finasseries technologiques…
Il apporte aussi sa pierre à la défense des Droits de l’Homme, d’une touche discrète. La chanson n’est-elle pas un plaidoyer pour les mariages mixtes ?
« Sur ton écran et dans mon cœur/
Mon sang est de la même couleur »
C’est enfin une réflexion sur la déchéance de l’artiste : « J'arrive de loin et ma fusée fuit de partout » (ou du reproducteur peu regardant, suivant certains exegètes peu amènes).
Ou peu-être bien que c’est juste un assemblage de mots au hasard… De toute façon, la cohérence textuelle, c’est dépassé.
Ou peu-être bien que c’est juste un assemblage de mots au hasard… De toute façon, la cohérence textuelle, c’est dépassé.
3) Allô à l’OVNI, 1980
Même si la pochette ne le montre pas, on ne quitte pas l’inspiration technologique (regrettées années 80, paradis des scientistes) avec ce titre sorti l’année suivante, chef d’œuvre de l’inécoutable aux textes des plus tortueux. J’avoue d’emblée, je ne pige rien aux paroles, salmigondis mal digéré de science-fiction, à base de rimes en –um et en –tique, de synthé aigrelets et de pseudo-voix d’ordinateur :
Allô radio spéciale Plutonium
Lance message bébé Uranium (…)
Allô radio fréquence Aquarium
Signale disque en Aluminium (…)
Mon laser est au délirium (à qui le dis-tu !!!)
Lance message bébé Uranium (…)
Allô radio fréquence Aquarium
Signale disque en Aluminium (…)
Mon laser est au délirium (à qui le dis-tu !!!)
Je ne voudrais pas jouer les mauvaises langues, mais la « fréquence aquarium », ça sent la rime prétexte (ou alors il a fumé je ne sais quoi dans un petit cagibi, ça expliquerait l’aquarium ET le délirium). En gros, notre spationaute rencontre un OVNI et tente un contact. C’est manifestement un message de paix entre les peuples (« S.O.S. je ne veux pas de combat (…)je suis un ami, réponds-moi »). Mais sans vouloir être alarmiste, Ringo est mal barré :
Il me tient dans un champ magnétique
Son ordinateur est bioatomique
Son ordinateur est bioatomique
Je n’ai aucune idée des performances d’un ordi bioatomique, mais enfin, la supériorité technologique de l’OVNI ne fait aucun doute. J’aimerais bien savoir ce qu’il est advenu de notre explorateur de l’espace, mais ses appels à l’aide sont manifestement restés lettres mortes. La fin de la chanson est ouverte. Mais vu la suite de la carrière de Ringo, je dirais qu’il n’en est pas sorti indemne .
G.
3 commentaires:
C'est une variante de "braderie" ?
ni plus ni moins. L'étymologie de "réderie" m'est totalement inconnue... je ne suis pas sûr qu'il existe un verbe "reder" (deux doigts coupe-faim - désolé)
En croisant les doigts pour que vous lisiez les commentaires de feu l'ex-blog des Pitous, je proteste ! Oui, parfaitement, je proteste !
Il manque au moins une chanson ultime parmi ce very best of Ringo : "Erotisme conjugal" :
http://www.dailymotion.com/video/k1zziVMY67lqYTl7fl
"C'est permis par la loi et les familles, tu es ma femme et nous aimons l'amour : c'est de l'érotisme légal et conjugal".
(amen)
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