Quoique professionnel de l'éducation (ça en jette, hein!), il y a des tas de choses qui m'échappent dans ce qu'apprennent les lycéens : calculer une intégrale, dire "Je m'appelle Pitou G." en espagnol (ou en russe, ou en mandarin...) ou prévoir ce qui se passe si on mélange de la soude et du chlore (je pense qu'il est sage de ne pas essayer). Mais rien ne me semble plus mystérieux qu'un cours de science éco : je n'en ai jamais suivi dans mon cursus scolaire et, déjà à l'époque, je considérais cette matière avec suspicion.
Quand j'écoute parler l'un de mes collègues, je m'aperçois cependant qu'elle ne sent pas tant que ça le soufre. Il s'agit notamment de familiariser les élèves à l'outil statistique, à l'étude de documents et, finalement, à former leur esprit critique. Hallelujah, la science éco poursuit en fin de compte des objectifs voisins des cours d'histoire ou de lettres. Voilà qui rassure : on se dit que l'éducation de nos bambins est un ensemble cohérent et qu'on forme des citoyens autonomes et tout et tout...
Le problème, c'est que ça dépend pas mal du prof. Je bondis quand un autre collègue de science éco balance des énormités éléphantesques comme : "ce n'est pas la vitesse qui est dangereuse au volant, mais la pluie". Là, encore, ce n'est qu'une parenthèse... Mais quand j'entends mon jeune beau-frère prendre pour argent comptant les propos péremptoires et très orientés politiquement de son prof et qu'il présente comme des vérités scientifiques ("il sait de quoi il parle, il a fait des études exprès"), je me dis qu'on est bien loin du regard critique et j'entre dans une colère noire afro-américaine!
"C'est bien de supprimer la carte scolaire car..." (je n'ai toujours pas pigé l'explication; pour moi, on ne supprime pas les feux rouges sous prétextes que certains conducteurs les grillent; pourquoi ne pas dépénaliser les meutres, puisque des gens en commettent de Haley? je ne vois pas comment la suppression de la carte scolaire pourrait enrayer l'élitisme!), "il faut baisser le SMIC, sinon les entreprises ne pourront pas payer leurs salariés" (bah voyons...)
Ce monsieur a le droit de penser ce qu'il veut (et moi, j'aurais le droit d'éviter tout contact avec lui, si jamais nous devenions collègues)(sauf s'il est super sexy, auquel cas je me contenterais de me boucher les oreilles), mais qu'on n'aille pas me faire accroire que le rôle de l'Education Nationale, c'est de manipuler la pensée de nos élèves, voire de leur donner des consignes de vote! On est quoi? Des captateurs d'opinion? Des directeurs de conscience?
Ce qui m'inquiète aussi, c'est de voir avec quelle admiration mon beau-frère parle de ses profs les plus démagos (c'est ce que j'en devine d'après ses dires; je reconnais que c'est bien peu pour établir un jugement définitif), alors que d'autres, qui n'ont droit à aucune forme de pitié, font probablement leur boulot très consciencieusement. Prime à la frime, ça n'a rien de neuf... ça nous ramène à l'éternelle question (si quelqu'un possède la réponse, je suis preneur!) : c'est quoi, au juste, un bon prof?