Je suis sidéré par cette espèce d'hommes - mon homme est de ceux-là - incapables de grasse matinée. Qu'on puisse affirmer sans ciller qu'on n'aime pas dormir, que c'est une perte de temps me laisse baba. C'est comme un manquement au genre humain, une transgression.
On m'a appris très tôt à voir dans le lit un lieu de plaisir, contact premier qui ne fut jamais démenti! Tout petit, j'allais me coucher de mon propre chef; si j'en crois mes parents, il m'est même arrivé d'aller me coucher sans qu'ils s'en aperçoivent... Bien sûr, à l'âge où dormir signifiait interrompre un jeu ou un film, je me suis fait prier. Mais me glisser sous la couette ne fut jamais vécu comme une contrainte.
Moi, le frileux, j'aime jusqu'au froid des draps que l'on vient d'ouvrir, parce que je sais et je sens qu'ils se réchauffent. J'aime cette idée que cette chaleur est la mienne, simplement emprisonnée par le dôme de la couette. Il me semble alors que j'irradie. Bien souvent, me concentrer sur cette impression suffit à me faire basculer dans le sommeil. Trouver refuge dans un lit déjà chauffé par V., tout auprès de son corps, participe d'une volupté encore supérieure. Le sentir réagir à ma venue est sans nul doute le moment le plus doux que je connaisse.
Vers dix ans, revenant de Gironde où nous avions visité la demeure familiale de Montaigne, je me découvris un modèle. Comme cet illustre prédecesseur, je m'éveillerais désormais dans la nuit pour le seul plaisir de me rendormir. Je réglai mon radio-réveil sur cinq heures, geste que j'ai renouvelé quotidiennement pendant de nombreux mois.
Depuis, j'ai fait taire ce réveil matutinal. Mais c'est encore un bonheur lorsqu'il m'arrive de m'éveiller avant cinq heures et que j'ai le loisir de me laisser pénétrer par la douceur et l'engourdissement.
G.
On m'a appris très tôt à voir dans le lit un lieu de plaisir, contact premier qui ne fut jamais démenti! Tout petit, j'allais me coucher de mon propre chef; si j'en crois mes parents, il m'est même arrivé d'aller me coucher sans qu'ils s'en aperçoivent... Bien sûr, à l'âge où dormir signifiait interrompre un jeu ou un film, je me suis fait prier. Mais me glisser sous la couette ne fut jamais vécu comme une contrainte.
Moi, le frileux, j'aime jusqu'au froid des draps que l'on vient d'ouvrir, parce que je sais et je sens qu'ils se réchauffent. J'aime cette idée que cette chaleur est la mienne, simplement emprisonnée par le dôme de la couette. Il me semble alors que j'irradie. Bien souvent, me concentrer sur cette impression suffit à me faire basculer dans le sommeil. Trouver refuge dans un lit déjà chauffé par V., tout auprès de son corps, participe d'une volupté encore supérieure. Le sentir réagir à ma venue est sans nul doute le moment le plus doux que je connaisse.
Vers dix ans, revenant de Gironde où nous avions visité la demeure familiale de Montaigne, je me découvris un modèle. Comme cet illustre prédecesseur, je m'éveillerais désormais dans la nuit pour le seul plaisir de me rendormir. Je réglai mon radio-réveil sur cinq heures, geste que j'ai renouvelé quotidiennement pendant de nombreux mois.
Depuis, j'ai fait taire ce réveil matutinal. Mais c'est encore un bonheur lorsqu'il m'arrive de m'éveiller avant cinq heures et que j'ai le loisir de me laisser pénétrer par la douceur et l'engourdissement.
G.
7 commentaires:
Plein de suggestions intéressantes ce texte supposé êtreconsacré au sommeil : « le lit un lieu de plaisir », « le sentir réagir à ma venue », « me laisser ... »
Tu parles du Montaigne père ou de Michel ?
C'est le père qui se levait très tôt et qui réveillait son fils...
Mais comme il avait raison de se lever tôt : j'adore être debout avant tout le monde ; j'ai l'impression alors que ce monde m'appartient (et c'est tellement bien le matin pour lire, écrire) ; sauf que je suis incapable d'aller me coucher le soir ; les nuit sont donc très courtes...
Je suis plus du tempérament de V., je pense... Mais j'ai aussi de très beaux souvenirs de bons moments au lit, à dormir en cuillère, etc.
Mes souvenirs d'enfant ont sans doute confondu père et fils.
Je n'affirme rien quant au fils, Michel, celui que nous connaissons ; je me souviens que le père réveillait le fils très tôt aussi et je crois me souvenir aussi que celui-ci se mettait à l'étude des langues anciennes... Pour moi aussi ce sont des souvenirs lointains, plus lointains que les tiens ; je pourrais essayer de trouver le renseignement, msis je n'en ai pas le temps en ce moment précis. Ce qui compte, au fond, c'est l'association que tu fais entre la volupté que tu trouves à dormir, au point de te réveiller très tôt pour jouir du bonheur de te rendormir...
Comme je te comprends G. néanmoins je trouverais sacrilège l'interruption de mon sommeil pour le seul plaisir de le recouvrer illico ! Oh non ! Prendre le risque de l'insomnie est un risque que je refuse de prendre.
Quant à la théorie de V. ... HERESIE !!!!
Celui qui fait partie de ceux qui sont incapables de faire une grasse matinée s'est gentiment levé à 9h, et encore parce qu'une sonnerie d'interphone véhémente l'a tiré du lit! Il est vrai toutefois que cela marque une vraie différence; combien se seraient levés, sachant que la sonnerie d'interphone, je devrais dire du visiophone, émanait du préposé chargé du énième réglage de l'engin (cela pourrait faire l'objet d'un texte, d'ailleurs, tant l'ineptie de la chose videophonique est patente!)
V.
V., il faut faire comme moi ; je ne réponds pratiquement jamais à la porte, à moins que je n'attende vraiment quelqu'un... Même de l'intérieur de l'immeuble, je veux qu'on me téléphone si l'on veut me parler... Bien entendu, cela ne s'appliquait pas à mon petit voisin ; de toute façon, il avait la clé..
La même
Sans V
C'est Heureux
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