30 juin, 2006

Délibérons, libérons

Radieuse cité historique de la langue française (1539), 10h du matin.

Même si les Fées se sont penchées de très près sur mon berceau, elles ne m’ont pas doté du don d’ubiquité. Que faire quand on appartient à deux jurys pour savoir où siéger ? Plusieurs critères entrent en jeu. J’ai eu du pot (bisous Marraines les Fées !), tous convergeaient vers le même jury…

1) Le nombre de copies. 61 contre 60.
2) La moyenne. N’est-il pas charitable d’essayer de remonter le moins bon des deux paquets ?
3) Le nombre de professeurs présents dans la salle. On va là où il y a le moins de monde, évidemment.
4) Le degré de luminosité de la salle
5) La tronche de celle qui préside le jury. L’autre a vraiment l’air trop pète-sec…
6) Euh… Il est prof de quoi le minou, là-bas ? Je dois bien ça à ma curiosité !

Voilà un protocole décisionnel quasi-scientifique. Les (vraies) délibérations se sont passées sans heurts, faute de tête de lard parmi mes collègues. Chacun y a mis du sien. Des fois, faut pas croire, mais ça fonctionne le service public à la française !

G.

28 juin, 2006

No no never!


"Putain, elle a vieilli Laura Ingalls!"
Cousine de Poussinou

27 juin, 2006

Nuit blanche chez Poussinou

Le coffre rempli de jeux de société d'un autre âge et d'une bouteille de limocello, nous mîmes les gaz vers Celtecourt-en-Picheurdie où notre ami Poussinou est devenu un propriétaire comblé. Bilan des courses : on n'a pas attendu les nouvelles technologies pour savoir se poiler. Nos lointains ancêtres des années 80 avaient déjà la recette du bonheur : deux bouts de carton, trois bidules en plastique et un peu d'imagination, et MM. Parker ou Ravensburger vous concoctaient des soirées princières.
A trois sur la pelouse, sur un arrière fond musical assuré par l'anniversaire de Maurice dans la salle des fêtes voisine, nous avons joué successivement à Scrupules, Therapy et Lifestyle (hélas pas Dé-connaissance de Patrick Sébastien), bref, que des classiques. Et étant donné nos éclats de rire (qui a déjà entendu Poussinou rire saura que je n'exagère pas), il n'est pas sûr qu'on n'ait pas gêné les joyeux lurons de la grande fête d'à côté...
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Part one : Apéro Scrupules
L'inconvénient majeur du jeu de plateau, c'est qu'il monopolise la table. Où poser radis, olives et cornichons? La solution, c'est Scrupules, le seul jeu de plateau sans plateau. A bien y regarder, on n'a pas non plus trouvé de règle du jeu... Nous avons donc fait comme si nous n'avions pas vu ces drôles de cartes à double-face fourche/auréole, afin de nous concentrer sur l'essentiel : les questions.
Scrupules, c'est le jeu qu'aurait inventé Saby Banana si elle avait travaillé chez MB au lieu d'être bêtement à l'école primaire, elle qui a rythmé mes années lycée de ces "Tu préférerais être sourd ou aveugle? ou mieux "Tu préférerais que tous tes amis meurent le même jour ou un seul chaque année à la même date et tu sais pas qui?". Vous l'avez compris : Scrupules possède un fort potentiel.
C'est donc entre deux verres de gnôle que nous avons répondu à des questions essentielles comme : "Vous passez au jeu de la vérité (oui, c'est un peu daté). On vous demande si vous avez trompé votre conjoint(e). Utilisez-vous votre joker? (autant dire oui directement!) ou encore "Vous êtes directeur d'une école de jeunes gens. Vous faites passer un entretien d'embauche à un excellent pédagogue, mais que vous soupçonné d'être homosexuel. L'engagez-vous quand même?" (ça va pas mieux? NON, cela va sans dire!). Inutile de dire que les questions finbissent par se répéter un peu. Et c'est là qu'on s'aperçoit que nos prises de position ne sont pas toujours très cohérentes...

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Part two : dîner ****
Poussinou s'est pris pour Bree Van De Kamp. Entre les merguez et la Tatin de magrès de canard aux pommes, il a fait son choix : cuisine.

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Part three : Thérapy post-cenal
Après s'en être mis plein la panse, on essaie de comprendre pourquoi. C'est Parker qui va nous y aider, à l'aide de pions en forme de divans qu'il faut garnir de picots de couleurs (une couleur correpondant à un âge de la vie, de la petite-enfance au cosmos, joli euphémisme des Lacaniens des jeux de plateaux). L'intérêt du jeu résidant tout entier dans les séances de thérapies où chacun a l'occasion de psychanalyser son adversaire, formule qui ne laisse pas de m'émerveiller.
"Dis-moi, Ghislaine, quel joueur autour de cette table serait à ton avis le plus à l'aise sur une plage naturiste?" - Allez savoir pourquoi, ça n'a pas fait débat...
Le patient écrit sa réponse, le thérapeute aussi. On compare les résultats et si ça coïncide, tout le monde est content le patient repart guéri (faut dire que c'est une thérapie de choc) et l'analyste gagne un picot. Bon, faut admettre qu'à trois, c'est pas bien compliqué...

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Part Four : thé/ digestif Lifestyle
Autant le dire tout de suite, Lifestyle, c'est notre coup de coeur. Et dire que nous fûmes sceptiques! Le jeu social par excellence où il faut savoir se projeter dans les pensées de l'autre? Le principe est assez simple : vous tirez une carte-question relevant d'une des 7 catégories (environnement, habitat, cuisine, vacances...) puis tirez 5 photographies de la même catégorie. Vous vous assurez qu'elles peuvent répondre à la question posée, vous en écartez une et puis vous les classez par ordre de préférence, en plaçant des jetons face cachée.
Exemple : quel plat vous fait le plus envie maintenant?
Photo : pizza - soupe de cresson - méchoui - sorbet à la poire (exit, soupe à la tomate!)
Les autres candidats doivent deviner votre classement. En l'occurrence, il n'a fait aucun doute que mon homme avait envie d'une pizza et pas du tout de soupe au cresson... Les joueurs, hormis le joueur cobbaye, avancent leur pion en fonction de leurs bonnes réponses. Pas chien, monsieur Ravensburger nous donne ses recommandations pour passer une bonne soirée :
"Nous conseillons à tous les joueurs et plus spécialement à celui qui estsur la sellette, d'expliquer pourquoi ils ont placé telle photo en 1, telle eutre en 2 etc... De ce fait, vous alimenterez des discussions toujours très intéressantes".
Eh bien on n'a pas regretté une seconde le conseil. Vivement que nous essayions la variante champion!

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Part five : parce que nous ne sommes pas des hommes des cavernes
Il commençait à faire humide, sur les coups de 3 heures du matin. La musette à Maurice avait fini par stopper ses tchik-tchik-poum-poum. J'avoue qu'on a fini la nuit un peu piteusement à jouer sur la game cube à Mario Party. Mon homme a brillament remporté la coupe au cours d'une émouvante cérémonie virtuelle à laquelle Poussinou n'a pas pu assister, violemment rattrapé par le sommeil et son 'tit punch maison.

Cet article est comme la soirée : il ne connaît pas de chute.

G.

24 juin, 2006

Metaphysis 5

Pourquoi les comptines que l'on chante avec le plus d'innocence aux jeunes enfants sont-elles les plus obscènes?

23 juin, 2006

Youkiiiiii

Youkiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii.

Y a pas à dire : 120 copies, ça pèse son poids sur la conscience. Même toutes notées et anotées, l'idée d'avoir sabré l'une plus que l'autre me hante. C'est là que je regrette d'être perfectionniste : comme s'il existait LA note juste! Bon, cela dit, je vais quand même y rejeter un coup d'oeil, histoire d'harmoniser l'ensemble.

G.

22 juin, 2006

Merchandising

R. me signale l'existence de gel douche à l'extrait de yoghourt (p'tain, je sais jamais où qu'il est le h!). Déjà, faut pas le faire tourner, le flacon, sous peine de se laver à l'emmenthal (ce h là est moins con, il est Suisse, pas Bulgare : on voit tout de suite de quel côté du Danube est la civilisation!)
Je suggère dans le même ordre d'idée :
  • le yahourt à la quiche
  • le shampoing au boudin noir
  • le parfum Saucisson d'Auvergne (et ça, sans déconner, je saute dessus!)
D'autres propositions?

G

Et un grand soupir de remotivation !

Plus que 12. La pression se lève doucement. Il restera encore à harmoniser l'ensemble.

Il est temps de faire une liste de quelques perles, assez rares du reste, les mauvaises copies versant plus dans l'imposture intellectuelle que dans le grand guignolesque...
  • Des trouvailles langagières : la superchérie, vis-vers-ça, calomniser (je passe sur l'usage calamiteux du passé simple : à l'issue de leurs études secondaires, pourquoi le maîtriseraient-ils mieux qu'en 6ème?), il n'a pas therme (ça, ça reste un mystère, même en contexte).
  • Des formulations malencontreuses : tout le monde cherche à se convoiter; lorsqu'Atalante (Adonis, en fait) meurt durant une chasse, Vénus est très triste et elle continue à faire des fêtes; ils assistent à la levée du roi (je ne pensais pas que Louis XIV était une belette).
  • Une histoire revisitée : La Bruyère était un simple ouvrier, un paysan; Les amours de Zeus et Galilée.
Avoir enduré tout ça - pas sans plaisir, au fond - , je saute de joie à l'idée que 120 corrections devraient financer mon budget cornichons pour la quinzaine semaine!

G.

Hein?

5, oui, j'ai bien écrit CINQ, visites simultanées sur ce blog? Qui me fait cette blague?

G.

21 juin, 2006

Et un grand cri d'encouragement !

Plus que 25 !!! Youki!

G.

Apophtegme (ça arrive)

Il est des relations dont il faut savoir se sortir, digne ou pas.

G.

Aphorisme boîtager

La Faim commence quand on mange ses saucisses-lentilles directement dans la boîte.

G.

19 juin, 2006

27, est-ce si désastreux?

J'ai délaissé ce blog pour cause de semaine surchargée. En toute logique, c'est précisément quand on a beaucoup de choses à raconter qu'on n'a pas le loisir de le faire. Que de retard à combler! A tout seigneur tout honneur : jeudi dernier, j'ai eu 27 ans.

Cela fait tellement longtemps que je m'y prépare que j'ai le sentiment de les avoir depuis un an. Je ne sais pas pourquoi, je n'ai jamais accroché avec le 26. Du coup, je suis tout étonné de ne me retrouver qu'avec 27 ans! Moralité : Anticiper, c'est le meilleur moyen de rajeunir. Autre bonne nouvelle, Rafaele est revenu de Puputt précisément le jour de mon anniversaire, en guise de cadeau, j'espère! Comme je suis total déphasé, je viens de m'en rendre compte. J'ai passé un super week-end avec ma famille, venue exprès en Amiénie, mon homme et mon fidèle tas de copies que je ne quitte plus...

Car il faut bien que j'aborde aussi le chapitre des nouvelles maussades qui ont fait de mon anniversaire un jour assez maussade qui est passé inaperçu à mes propres yeux. Au chapitre des anecdotes, j'ai fait une moisson de 120 copies de bac. En soi, ça ne me déplait pas. En plus, ça fait partie "tant au niveau moral que juridique des obligations inhérente à la fonction d'enseignant" (bien formaté, hein?). En bonus, je ne suis pas déchargé de mes cours au collège. Mais comme ça représente approximativement 60 heures de correction, pas le temps de me farcir des cours à préparer. J'ai prévenu les amuse-gueule : "les mioches, je vous cloque devant la télé et vous me laissez corriger, ok?". 60 heures, soit deux copies (en fait 4, puisqu'il y a deux mini-dissert dans cette épreuve) par heure. Cela semble peu, mais c'est la moyenne avouée par d'autres collègues présents à la réunion. Quand on est lancé, on en fait trois dans l'heure; mais comme on est naze après la quatrième, la moyenne repasse systématiquement à deux. Wouarf.

Et comme j'ai vraiment envie de consacrer du temps à des nazeries, en plus de mon quota de douze copies par jour auquel je refuse catégoriquement de renoncer (je sais être rigide, moi!), je dois témoigner le soir comme plaignant à un simili-conseil de discipline, où il a fallu extorquer deux mots d'excuses proférés avec agacement et sans me regarder par la petite canaille qui avait gravé une table à ma gloire. Ma présence était vraiment indispensable, vu les éléments nouveaux que j'ai pu apporter ("euh... bah... si tout a été dit..."). J'étais juste là pour appitoyer les membres du conseil. Avant de m'y pointer, je me suis demandé si je devais avoir l'air misérable, comme le voulait la tradition latine, avant de me souvenir que ça valait uniquement pour les accusés. Là est le problème : j'avais vraiment le sentiment d'être le fautif et elle, la victime. je me souviens encore des paroles de sa mère, en rendez-vous particulier juste après l'incident : "de toute façon, vous n'êtes pas idiot, vous savez bien ce qui se dit sur vous depuis quatre ans! Mon fils déjà m'en parlait à l'époque"... J'ai pas voulu avoir l'air de me justifier, ni de me dédouaner. Donc, j'ai eu l'air con. Je suis ressorti de là en rage, juste assez cynique pour le conseil de classe qui a suivi. Je suis vengé, la dame a pleuré lors du conseil au point de devoir sortir. Passons allégrement.

Sinon, toujours à titre de réjouissance, Saby Banana nous a appris qu'elle ne croquerait plus son MM's. 6 ans de gourmandise qui s'arrêtent là, tout de même. Les poissons de mon homme ont bouilli suite à un incident technique. Le restau d'anniversaire était on ne peut plus décevant... J'oublie quelque chose? N'en jetez plus. J'en garde un peu pour les jours à venir. Allons, on se console : les fins d'années scolaires sont rarement sereines en dépit des apparences!

G.

Ascèse

Aux gentils zigotos auxquels nous manquerions : désolé de ne pas être plus présent sur le blog. Je suis rentré en ascèse depuis mercredi dernier, date de remise de mes copies de bac. Bonne nouvelle, j'en ai fait plus de la moitié. Mauvaise nouvelle, ça veut dire qu'il m'en reste une cinquantaine...
Je vis en reclus, coupé du monde. Pour éviter toute tentation, l'ordi reste éteint. Aujourd'hui, j'ai voulu m'octroyer une petite exception pour récompenser mon abnégation et ma rigueur (je ne me croyais pas capable de me plier à une telle discipline) et... j'ai été inefficace comme jamais. L'usure. J'ai tellement peur de trop me relâcher et de ne pas réussir à m'y remettre que j'ai un peu tiré sur la corde, je crois....
Pour les autres tentations technologiques, je tiens bon : ni radio, ni télé. Même pour les infos. Même à table. Si c'est pour entendre parler de foot, de toute façon, j'aime autant écouter le ronronnement du micro-ondes! A bientôt, dans une ambiance plus propice à la détente...

G.

13 juin, 2006

Taedium vitae

Des fois, il faut encaisser de ces trucs...

G

12 juin, 2006

Des animaux et des hommes

Exercice de vocabulaire sur les expressions animalières:
- Voyons Vincent, dis-moi quel animal est fidèle, d'après toi.
- Le dindon, répond mon gentil 6e.
- Le dindon est un animal fidèle? demandé-je un peu goguenard.
- Parfois.

Vision réjouissante d'un petit garçon vivant une grande amitié avec un dindon aimé après plusieurs déconvenues avec des congénères infidèles.

V.

Sérénade au clair de lune

Maou-mi
miaou-ou
maglouuu
miou-mi

Soirée tranquille sur notre terrasse. La nuit est douce. L'immeuble connaît une animation digne d'un village provençal, et nous autres, humains, ne sommes pas les seuls à en profiter...
Stuart l'acrobate exerce ses talents sur toutes les terrasses et balcons de l'étage et ponctue chacun de ses pas d'un commentaire de velours. Notre chat est un bavard : il semble érailler sa voix chevrotante à tout propos. Pas facile, au quotidien, d'en comprendre l'intention. Mais ce soir, c'est assez clair : monsieur nargue, monsieur fait son intéressant. En effet, tandis qu'il parade plus ou moins noblement, librement en tout cas, son compère Rimbaud, au deuxième étage, l'observe avec envie derrière ses barreaux.
Le dialogue a duré trois plombes, quelquefois agrémenté de quelques aboiements caverneux de Kérobéro, le molosse du dessus qui doit peser deux fois mon poids (bave comprise). A force de provocations, notre redoutable dévoreur de mouches réussit à pousser Rimbaud au crime. Qui aurait dit que Stu jouerait un jour les c(h)aïds, la ra... chacaille? Son petit voisin enfreint la loi, au grand dam de sa maîtresse, et gagne le balcon adjacent dont il aura bien du mal à revenir. Et qu'importe s'il est puni pour le restant de la soirée, il s'est fait un nouveau copain, un brin voyou.

G.

L'admiratrice anonyme

Me voilà soulagé : toute la gent féminine ne me déteste pas. J'avais bien besoin d'un petit réconfort après les inscriptions faisant mes louanges découvertes la semaine dernière (pour mémoire : batard, boufon, enculé, PD, gros PD, la pute, gros bite tout pouri...). Ainsi j'apprends ce matin que l'assistante middle-westienne qui a regagné ses pénates a donné des nouvelles à ma collègue d'anglais.
"Elle m'a demandé de tous vous saluer, et tout particulièrement toi, G."
Clin d'oeil appuyé.

G.

11 juin, 2006

Triste monde tragique ?

On répète à l'envi que les gens d'aujourd'hui ne sont pas solidaires. A écouter les médias, si les gens n'interviennent pas lors de violences perpétrées en public, c'est par égoïsme. Balivernes! Faut-il être stupide pour croire les gens incapables d'empathie à ce point! Ne savons-nous pas tous inconsciemment qu'il faut aider pour espérer être aidés en retour? C'est un phénomène de groupe, rien d'autre, qui nous paralyse : il y aura bien quelqu'un dans cette foule qui sera plus qualifié que nous pour intervenir? Deux exemples à l'appui.

Je l'avoue, j'ai moi-même été un de ces stupides êtres humains frappés par le phénomène de groupe; et pas plus tard que cette année. Moi, individu responsable, j'ai vu une femme assez âgée tomber de l'autre côté de le rue à une heure d'affluence, et tenter de se relever seule pour retomber plus pitoyablement encore. Allons, il y avait un groupe de lycéens juste à côté d'elle! Ils semblaient ne même pas l'avoir vue. C'était quand même étrange, cette scène : j'en suis venu à douter de la réalité de cette chute. Que croyez-vous que j'ai fait? J'ai fait semblant de ne rien avoir vu et me suis maudit mille fois sur le trajet du retour. J'ai eu honte à me haïr, vraiment, sincèrement. A vomir presque de ma propre lâcheté... Si j'avais été seul dans la rue au moment de cette chute, je suis persuadé que je serais venu à son aide. C'est bien le regard de nos semblables qui nous inhibe.

Un autre exemple de ce phénomène, moins mortifiant mais à peine, remonte à l'époque de ma première année d'enseignement. Tout jeune stagiaire dans la Manche, je prenais le bus (après plus d'une heure de train) pour rejoindre le bahut. J'y retrouvais souvent une collègue d'espagnol. Un matin, une rixe éclate entre deux jeunes pour une histoire de regard de travers (le plus sordide est que c'en fut le motif réel, unique et atrocement banal), et ce à deux pas de nous. Prostration : alors que ces deux zouaves se talochent joyeusement, je reste comme deux ronds de flan à tergiverser pour décider de l'attitude à avoir. Oh! quelques secondes à peine, juste le temps pour ma collègue (plus proche, certes, on se réconforte comme on peut) de se précipiter vers eux, sans prendre la peine, elle, d'intellectualiser. Elle s'interposa en les grondant. Comme elle avait pris l'initiative d'agir, je me suis senti en droit, enfin, d'intervenir. En les maintenant à distance l'un de l'autre, j'ai même cueilli un coup dans le tibia - une broutille en comparaison de l'estafilade infligée à l'estime de moi-même.

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Mais tout ceci m'emmène assez loin du souvenir qui a motivé l'écriture de cet article, un souvenir témoignant en faveur d'une vision optimiste de l'homme. Car, en fin de compte, nos vies sont ponctuées de bienfaiteurs que nous ne pourrons jamais remercier. Je veux rendre hommage ici à une bienfaitrice anonyme pour un geste minuscule, mais qui, je crois, a contribué à forger mon sens moral.

Pendant que mes parents arpentaient les rayons de feu Continent, l'achat gagnant, mon frère et moi, comme bien d'autres enfants, restions dans le coin BD de la grande surface. Comme il se devait, j'emportais dans ce temple de la consommation mon petit porte-monnaie - une espèce de bourse fort peu pratique mais au cuir velouté et à l'odeur caractéristique qui sera pour moi, à jamais, l'odeur de l'argent. Il était blotti au fond de ma poche. Il faut croire que celle-ci n'était guère profonde et que la-dite bourse était fort peu renflée : en tout cas, peu de temps après avoir retrouvé mes parents dans le magasin, je me suis aperçu que je l'avais perdue.

Brusque sursaut d'angoisse, comme j'en ai connu des milliers depuis (était-il le sursaut fondateur, ou déjà une réplique?). Retour haletant au rayon BD. Je scrute le sol avec mon papa. Rien. L'angoisse monte d'un cran - je sais, c'est dérisoire, mais rien n'était dérisoire, surtout pas les objets, aux yeux du petit garçon très sensible que j'étais. Mon père m'a alors traîné jusqu'à l'accueil du magasin. Reconstruction de ma mémoire? Il me semble que je vois encore le visage du monsieur : "Tiens : c'est une petite fille de ton âge qui nous l'a apporté!". Je ne sais pas pourquoi, le mystère qui entourait l'identité de ma bienfaitrice a excité mon imagination : je la connaissais peut-être!

Bien des années plus tard, au lycée, lorsque j'ai sympathisé avec Nadja, ce souvenir est remonté à la surface. Sans que je sache pourquoi, j'ai acquis la certitude que c'était elle, ma petite bienfaitrice...

G.

P.S. : à bien y réfléchir, j'ai dû connaître mon premier sursaut d'angoisse à la perte - heureusement provisoire - de ma douce Cassolette, un 14 juillet.

10 juin, 2006

Citation 2

Les filles, ça trouve toujours des rimes en -ASSE pour parler de leurs copines.

Hébus, troll, in Lanfeust.

09 juin, 2006

Anthropologie

Il est des garçons aux moeurs bizarres : les hommes défilent, le restau reste.

G.

L'homme du jour : épilogue

L'enquête fut diligente, mes soupçons confirmés, la sanction proportionnée. Je reste bouche-bée devant le pouvoir de consolation de mon chef, devant lequel je m'étonnai de la violence des inscriptions : "Oui, hein, c'est vraiment de la haine qu'elle exprimait là".
Pas gloups.
Maintenant, il ne me reste plus qu'à remailler la classe.

G.

L'homme du jour 3

Stupéfaction. Le petit mot gravé sur une table (celui-là) n'était que la face visible de l'iceberg. Hier, j'ai découvert une explosion d'insultes à mon envers sur une table et le mur concomittant. C'était fleuri mais pas très original, avec un certain souci de variété mais pas de l'orthographe. L'objet n'est pas ici de les reproduire, pas de faire part de cet étrange sentiment de viol et d'humiliation mais de m'interroger. Je sais qu'ailleurs, c'est une pratique commune. Pas de couteau, pas de crachat en pleine face, pas de menace... De quoi je me plains?

C'est vraiment déroutant d'être victime d'un tel déchainement sans avoir l'impression d'avoir fait quoi que ce soit susceptible de l'expliquer. Le plus insidieux est que ça instille le doute. On aura beau dire que certains de ces gosses ne sont pas doués pour l'école, ils le seront tous et toujours pour trouver les failles. La perversité a de beaux jours devant elle, cette noble institution qu'est l'école est une féconde pépinière.

G

Gemellae meae

Qu'elle fut douce la lecture de ta lettre, Mab, ma soeur Mab! Et que j'ai hâte de te revoir!

G

07 juin, 2006

Versatile jeunesse

L. est prostré. Il chiale, n'a pas ses affaires, joue dangeureusement du compas (vite confisqué, avec équerre, ciseaux et tout instrument potentiellement mortel), fait mine de vouloir s'énucléer ou se taillader les artères : sa copine a eu l'inconséquence de le larguer à la récré juste avant mon cours (connasse!). Cela va de soi, arrivé en juin, je ne vais pas exiger de lui qu'il se mette à travailler. Alors il s'acharne sur la couverture de son cahier où il avait gravé : L+ Connasse for ever ("Euh... je te conseille de ne jamais te faire de tatouage!), comme il avait gravé en octobre L + Godiche, en novembre L+ Bécasse et en février L + Nunuche. Mystère, mystère : les mecs moches ne restent jamais célibataires au collège; mais ce n'est pas l'objet de cet article.
Les affres de la dépression se referment sur notre brave Pierrot lunaire. Puis, insensiblement, il commence à ricaner, le bougre. Sur l'équerre qu'il a piquée à sa voisine, il inscrit quelque chose au blanco. Je m'approche, plein d'espoir (c'est forcément son cours, non?) : "MIAM 19 cm"

Primo : à 13 ans, chapeau bas
Secundo : je savais la jeunesse changeante (pas au point de se passionner pour mon cours, mais bon...), mais tout de même!

G.

06 juin, 2006

L'homme du jour 2

Assassine, cette inscription rose dans une écriture exagérément enfantine (afin qu'on ne reconnaisse pas le tracé?) :

"M. S j m pa té cour y son pouri vas te fair..."

L'inspecteur G. mène l'enquête; ça va pleurer dans les chaumières!

L'homme du jour

Comment calmer le cuistot de Patelinvillers? Bromure? Là, c'était plus de la drague à la petite semaine à la photocopieuse, en comité réduit!

"Oh qu'il est beau avec son coup de soleil!
_ Et encore, tu n'as pas vu mes bras! (note pour moi-même : ne plus chercher de répartie avec lui)
_ Bah je sais pas, tu ne montres que ta figure! Fous toi à poil, qu'on puisse en profiter!"

La scène? un réfectoire plein à craquer. Rien que de très intime!

G.