...pour résister aux réunions chiantes
Cette année a vu une multiplication des réunions professionnelles, toutes mortellement ennuyeuses. Le genre de réunions où le seul moyen de sortir de la torpeur serait de participer au débat mais où, même en grattant dans tous les recoins de votre crâne, vous vous apercevez qu'on n'a rien de rien à dire. D'ailleurs, un coup d'oeil circulaire vous apprendra bientôt que tout le monde ou presque est dans le même état alarmant. Heureusement, il y en aura toujours
un pour monopoliser la conversation. Le reste du temps, on se débrouille pour acquiescer régulièrement
(mais pas trop : tout est une question de mesure) aux propos particulièrement plats de la chef.
Le problème, c'est qu'au bout d'une demi-heure de ce traitement, paradoxalement, une immense excitation m'envahit. Je deviens intenable. Un vrai gamin! Toute l'astuce consiste alors à s'amuser et se défouler sans en avoir l'air
(il ne s'agit évidemment pas de se faire griller : on a acquis inexplicablement la réputation d'un homme consciencieux, on ne va pas saboter sa carrière, hein!).
La première phase, c'est l'
actor studio : au moment le moins probable j'affecte un vif intérêt, puis soudainement l'air pensif
(genre la révélation inouïe qui vient d'être faite - "il faut chercher la réussite des élèves" - révolutionne ma perception de la pédagogie et galvanise ma vocation). Après je me rengorge et je fais le paon. Une réunion de travail, c'est comme la cour de Versailles.
Mais comme je n'ai pas beaucoup de postures à caser, il faut vite que je passe à autre chose, sous peine de ressembler à José Garcia dans le rôle de Cyndie Tropforte aux côtés d'Antoine de Caunes. La deuxième phase consiste à capter les regards de connivence avec mes collègues
(si possible ceux qui se marrent pour un rien), sourire en coin, voire à les pousser à la faute. Au moment où ils vous regardent, c'est le moment de réenclencher la première phase : prenez un air intéressé tellement outrancier qu'il pue l'ironie à 300 mètres
(à croire que la chef est à deux km). Mais cela aussi n'a qu'un temps.
Comme l'ordre du jour n'est pas épuisé et qu'il trouve même le moyen d'enfler au fur et à mesure, il faut d'urgence trouver d'autres petits trucs auxquels se raccrocher
(attention coma!). C'est là que vous vous félicitez d'avoir choisi la bonne voisine à taquiner. Cette phase est notablement moins discrète que les précédentes mais :
- Primo : c'est ça ou la camisole de force.
- Secundo : à ce stade de la réunion, la chef est emportée dans une interminable déclaration de principe et ne semble vraiment pas se rendre compte du monde qui l'entoure.
- Tertio : ça vous redonne le frisson des petits mots échangés quand on était au lycée; ça colle parfaitement à l'humeur de régression qui m'étreint lors de ce genre de conciliabules.
- Et de quatre
(je ne sais plus l'adverbe correspondant, ça la fout mal, hein?) : en plus de sauver votre peau, vous volez au secours d'un autre otage. Vous êtes un saint homme.
Aperçu :
F.
visant un des deux milles documents qui nous ont été distribués: ça veut dire quoi MaJ?
G
pas inspiré et soucieux d'épater F. avec sa science : Mise à jour, sans doute.
F. : Tu es sûr que ce n'est pas
Majépaenvid'êt'la?
Bilan : en fait, j'ai trouvé plus insupportable que moi.
Bilan 2 : à force de nous réunir dans la salle la plus froide qu'on puisse imaginer, mes mains se sont changées en glaçons; celles de F. aussi. D'ailleurs, elle me les colle sur le visage pour me le prouver. H. roupille. P. grimace. M. est explosé de rire. D. et I bavardent à trois mètres de distance. Bref, cette réunion ne ressemble plus à rien. De forts doutes pèsent sur l'acuité visuelle de ma chef qui ne semble pas s'en émouvoir.
Et vous, quelles sont vos stratégies de survie?
G.
P.S. :
J-2.